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LA KABYLIE
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LA KABYLIE

VIP-Blog de t-ould-hamouda
archi_yves@yahoo.ca

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  • Créé le : 15/09/2008 03:13
    Modifié : 12/08/2013 15:11

    Fille (0 ans)
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    TAFSUT EN OUVERTURE SPECTACLE DE FERHAT MÉHENNI

    27/10/2008 01:19





    MONTRÉAL LE 21 JUIN 2008

    Commentaire de yanis (02/11/2008 04:21) :

    Bonjour J'aimerai féliciter le groupe Tafsut pour tous ses efforts ici à Montréal et partout au Québec en vue de faire connaitre notre culture. Toutes mes félicitations et sachez toutes et tous qu'on vous admire beaucoup. Bonne continuation. Djedjiga

    yanisiza@yahoo.fr




    HOMMAGE À FERHAT MÉHENNI - CHANSON GAB

    27/10/2008 01:13





    PHOTOS DIVERSES - TROPHÉE REMIS À MONTRÉAL




    FERHAT MÉHENNI À MONTRÉAL

    27/10/2008 00:51










    FERHAT MÉHENNI À RADIO CANADA

    27/10/2008 00:49










    FERHAT MÉHENNI - BERROUAGHIA

    27/10/2008 00:48










    Interview de Ferhat Mehenni par le journal Amenzu de l’ACBB

    23/10/2008 19:59

    Interview de Ferhat Mehenni par le journal Amenzu de l’ACBB


    25e anniversaire du Printemps berbère

    Interview de Ferhat Mehenni par le journal Amenzu de l’ACBB

    dimanche 10 avril 2005


    1) Amenzu : Qui est Ferhat ? Présente- toi aux lecteurs d’Amenzu et aux bretons.

    Ferhat : Il m’est toujours difficile de me présenter. Par pudeur et par gêne morale. Il me semble que ce que l’on attend de moi dans de pareilles circonstances c’est de louer les qualités d’une marchandise que je refuse d’être. Je m’en remets toujours aux autres pour donner l’image qu’ils ont de moi. Par rapport au mien, leur regard me parait souvent plus fiable y compris lorsqu’il est méchant ou complaisant. Mais pour sacrifier à ce rituel d’ « Amenzu » disons que j’ai cinquante quatre ans dont plus de trente consentis au service de la cause identitaire et culturelle berbère à travers la chanson ou le militantisme sur le terrain. Leur facture est toutefois assez lourde : douze arrestations du temps du parti unique, la torture subie sous les ordres de l’actuel général Smaïn LAMARI en avril 80, un nez cassé par les matons de la prison de Tazoult-Lembèse le 2 janvier 1986, des tentatives d’assassinats au début des années 90 … Pourtant c’est l’assassinat de mon fils aîné Ameziane, le 19 juin 2004 à Paris dont je ressens le plus la cruauté puisque tout le monde suppose qu’il a été tué pour me faire payer mes positions politiques. Pour autant, pas plus que les premières épreuves n’avaient pu entamer ma détermination, pas plus qu’aujourd’hui ou demain le cours de l’Histoire ne sera infléchi par des assassins qui par leurs actes ignobles espèrent arrêter la marche du peuple kabyle vers sa liberté. J’ai à mon actif de chanteur six albums dont le dernier dédié à la Kabylie est paru fin 2002, à celui de militant plusieurs organisations et à celui d’écrivain, un livre « Algérie : la question kabyle » paru en 2004 aux Editions MICHALON.

    2) Amenzu :Quel regard portes-tu sur la chanson kabyle actuelle ?

    Ferhat : Mon regard sur la chanson kabyle actuelle peut sembler exagéré ou intéressé. Il est vrai que notre chanson évolue en dents de scie mais cela ne doit pas remettre en cause les progrès qu’elle a accomplis et la beauté qui est la sienne. Personnellement c’est en elle que je puise mes réconforts, que j’accompagne mes états d’âme pour mieux repartir à la conquête de la vie. Ses mélodies, ses sonorités, ses rythmes m’ont toujours soutenu dans la joie, le chagrin ou la douleur. Je l’aime simplement et je suis sûr qu’elle a un bel avenir devant elle.

    3) Amenzu :Quels sont tes projets dans ce domaine ?

    Ferhat : J’ai quatre livres en préparation, un cd pour la fin de l’année 2005 et des conférences ici et là sur les domaines de mon intervention militante.

    4) Amenzu : Tu es aussi homme d’action. Pourquoi avoir créé le mouvement pour l’autonomie de la Kabylie ?

    Ferhat : Il serait prétentieux de ma part de m’approprier une œuvre collective que réalise le peuple kabyle à travers sa trajectoire particulière pour affirmer son existence et se donner un avenir de paix, de liberté et de fraternité. Nous n’avons créé le Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie, le MAK, qu’après avoir épuisé tous les voies et moyens que nous offre le cadre algérien actuel avec son soubassement despotique oriental et sa couverture idéologique jacobine française. Tant qu’il s’agissait pour nous d’aller en prison pour nos revendications nous l’avions accepté, tant qu’il s’agissait de nous dénier le droit à notre langue et notre identité nous avions continué à croire en une issue positive dans l’ensemble algérien. Tant qu’il s’agissait de discriminations ethniques dont nous étions victimes et dont nous souffrons toujours, nous avions placé nos espoirs en des organisations telles que le FFS ou le RCD, voire le MCB. Depuis qu’en avril 2001 le pouvoir a tiré sur nos enfants dans l’indifférence nationale totale comme l’a superbement chanté OULAHLOU dans son magnifique dernier album, nous avons considéré que l’irréparable était désormais arrivé et qu’un régime qui a tiré une fois sur le peuple kabyle, tirera de nouveau sur lui dès que des conditions similaires à celles de 2001 se présenteront, ce dont, malheureusement, nous sommes persuadés car l’Histoire se répète souvent. Alors, pour mettre nos enfants à l’abri de la violence armée de l’Etat, nous sommes condamnés à donner à la Kabylie les instruments de sa souveraineté locale à travers un statut d’autonomie régionale. Cela lui permettra de poser ses problèmes dans le cadre de ses propres institutions étatiques en relation avec le pouvoir d’Alger, au lieu de la rue où, jusqu’ici, elle a exposé la vie de ses citoyens. Elle aura, ainsi, à gérer sa langue et à assurer son développement économique loin des blocages dont le régime algérien a toujours usé pour briser nos élans en ces domaines.

    5) Amenzu : Où en est la construction d’un mouvement autonomiste en Kabylie ?

    Ferhat : En Kabylie, la revendication d’autonomie, si décriée au début par tous les intérêts établis, a fini par gagner le cœur et la raison. Ils sont rares les villages ou les quartiers dans lesquels nous ne comptons pas de sympathisants ou d’adhérents. Le MAK a réalisé un miracle. Il n’a pas encore abouti mais il est sur la voix du succès.

    6) Amenzu : Des tractations ou des discussions ont lieu entre le pouvoir algérien et les représentants des Ârchs. Qu’en pensez-vous ?

    Ferhat : Pour nous, le dialogue est une vertu cardinale. Aucun conflit moderne ne peut se terminer sans que ceux qu’il met aux prises ne se mettent autour d’une même table. L’erreur de ces délégués « dialoguistes » me parait venir de leur propre trajectoire. Ils étaient les premiers à jeter l’anathème sur tous ceux, nombreux, qui dès le départ avaient prôné le dialogue avec le pouvoir pour sortir de la crise en Kabylie. C’étaient eux, également, qui criaient sur tous les toits que la plate-forme de revendications d’El-Kseur était « scellée et non négociable ». Tout ce temps de douleur et de deuil kabyle n’aurait-il finalement servi que pour des règlements de compte et des questions de leadership au sein des Ârchs ? Il y a de quoi être inquiet quant à l’issue de ces « négociations » et de quoi douter de l’accord intervenu entre les dialoguistes et le pouvoir. Ceci est d’autant plus révoltant que cet accord stipule bien que l’Etat algérien ne reconnaît et n’accepte les 15 points de la plate-forme d’El-Kseur que « dans le cadre des lois de la République Algérienne Démocratique et Populaire ». Autant dire que le régime n’accepte que ce qu’il voudrait bien accepter, c’est-à-dire rien. Je pense aussi que les Ârchs auraient dû arriver à un large consensus entre eux pour entamer ces négociations et exclure tout coup de force par lequel un clan confisquerait le combat de tout un peuple. Il aurait fallu au préalable que le dialogue et les négociations aient d’abord lieu entre les membres des Ârchs mêmes avant de l’être avec le régime en place.

    8) Amenzu : Si la plate-forme d’El Kseur était entièrement acceptée par le gouvernement, y aurait-il encore lieu de demander l’autonomie ?

    Ferhat : La plate-forme d’El-Kseur est le reflet d’un consensus des diverses forces politiques présentes à la réunion tenue, dans la localité dont elle porte le nom, à la veille de la grandiose marche kabyle du 14 juin 2001 à Alger. Elle a eu le mérite de poser certains jalons et de mobiliser la Kabylie pour ses droits. Elle a néanmoins des tracés peu lisibles entre des revendications régionales propres à la Kabylie et des revendications nationales, valables pour l’ensemble de l’Algérie qui n’en demandait pas tant. Bien au contraire. Bref, elle est généreuse. Son manque de réalisme et les idéologies en place ne permettaient pas encore à ses rédacteurs d’avoir pour solution l’autonomie régionale. Elle s’attaquait prioritairement aux effets engendrés par la violence. Elle n’avait pas le temps de réfléchir aux causes des troubles que connaît notre région depuis l’indépendance de l’Algérie. Donc, même si la plate-forme d’El-Kseur est acceptée dans sa totalité, la Kabylie ne sera pas pacifiée politiquement parlant. Le problème numéro un de la Kabylie est qu’elle n’est pas qu’une région parmi tant d’autres mais qu’elle est aussi la première patrie du peuple kabyle. La Kabylie se bat, au fond, pour son existence et sa place dans la direction des affaires du pays à commencer par les siennes propres et non contre ce fumeux slogan fourre-tout, un pur produit de l’arabe algérien, qu’on dénomme « la hoggra ». Le projet d’autonomie régionale, lui, est réfléchi et englobe plus que les quinze points de la plate-forme en question. D’ailleurs à y regarder de près, ces quinze points ne peuvent eux-mêmes être satisfaits que dans le cadre d’une autonomie régionale puisque le reste des régions du payse n’en veulent toujours pas. Le MAK a de l’avenir.

    9) Amenzu : La Kabylie autonome privilégiera-t-elle des relations économiques avec la France et, particulièrement, avec la Bretagne ?

    Ferhat : La Kabylie a une relation quasi charnelle avec la France. La France est son horizon pour très longtemps. Elle n’aime pas son centralisme jacobin mais elle a envie d’avoir ses élites et sa modernité. Elle entend ainsi privilégier ses relations économiques et culturelles avec la France et avec tous les peuples d’Europe et plus particulièrement avec ceux qui endurent de dénis similaires à ceux que vit le peuple kabyle comme le peuple breton. La Bretagne est sœur de la Kabylie par son identité et sa projection dans l’avenir. Mais avant d’en arriver au statut d’autonomie nous pouvons déjà réaliser des jumelages entre villes et communes Kabyles et celles de la Bretagne. Nos hommes d’affaires peuvent dès maintenant échanger des informations sur les opportunités d’investissements dans nos deux régions. Nos chanteurs, nos écrivains, nos sportifs et nos artisans peuvent dès maintenant se tendre la main par-dessus les frontières et les obstacles que dresse le pouvoir algérien à de telles initiatives.

    10) Amenzu : C’est la première fois que tu te produis en Bretagne, que connais-tu de cette région ?

    Ferhat : C’est en fait la deuxième fois que j’aurais le plaisir et l’honneur de me produire sur la scène de cette très belle région. J’ai déjà participé à « la fête du peuple breton » si ma mémoire est bonn, en octobre 1981 à Brest. J’avais chanté juste avant Joe Coocker. Ce samedi 9 avril, je serai à Rennes pour célébrer le printemps berbère et pour une communion entre la Bretagne et la Kabylie. Ce que je connais de la Bretagne est plutôt culturel. C’est avec bonheur que j’avais lu en prison « le cheval d’orgueil » de Jakez Helias et c’est au travers des chansons bretonnes de Stivel, de Tri Yann ou de Gilles Servat que j’ai eu à découvrir vraiment la Bretagne.

    11) Amenzu : Ton dernier mot.

    Ferhat : Vive la Bretagne et vive la Kabylie

    Paris le 03/04/2005

     






    FERHAT MEHENNI À RADIO CANADA

    23/10/2008 19:53

    FERHAT MEHENNI À RADIO CANADA


    http://www.radio-canada.ca/audio-video/pop.shtml#urlMedia%3Dhttp://www.radio-canada.ca/Medianet/2006/CBF/Desautels200610061728_3.asx




    Hamid Medjahed : La renaissance de l’humble maître

    23/10/2008 19:43



    Incontestablement, Hamid Medjahed est l’un des compositeurs qui ont su, par leurs créations, donner ses

    lettres de noblesse à la musique kabyle. Son nom reste, certes, étroitement lié à des œuvres monumentales mais aussi à des noms d’illustres artistes tels que la diva à la voix d’or, Nouara ou encore les légendes, plus que jamais vivantes que sont Lounès Matoub, Taous Amrouche, Ben Mohammed… Hamid Medjahed c’est enfin ce nom qui se confond intimement à la célèbre émission « Icennayen uzekka » [1] qu’il a animé d’une main de maître, vingt ans durant à la chaîne II de la radio algérienne, jamais complaisant mais généreux en enseignements. C’était une école pour les « graines de stars » qui, pour évaluer leurs capacités artistiques, s’y rendaient pour affronter le maître « omnipotent », craint mais adulé à la fois.

    Ayant composé nombre des plus belles merveilles chantées par celle que d’aucuns n’hésitent à présenter comme la plus belle voix féminine de la chanson algérienne de tous les temps, Nouara en l’occurrence dont il parle avec des mots qui en disent long sur l’étendue de l’admiration qu’il lui voue : « …Nouara représente la modernité et la belle voix. On ne retrouve pas beaucoup de voix comme la sienne dans la chanson kabyle et même dans la chanson algérienne », Hamid Medjahed dont la carrière s’étire sur une quarantaine d’années, possède cette particularité de n’avoir jamais mis sur le marché ses œuvres qui s’écoutaient jusque là, exclusivement sur les ondes de la radio qui les diffusaient sur des interstices. A ce propos, il s’explique sans faux-semblants : « …Je n’ai jamais édité mes chansons en cassettes ou autre parce que je ne suis pas un commerçant. Je chante pour le public. L’argent tue l’âme de l’artiste. ». Trêve de réflexion, puis il reprend : « Tenez, si j’avais fais des cassettes à mes débuts, en voyant que cela me rapportait du pognon, j’en aurais produit le maximum d’albums. Pour y arriver, j’aurais composé du n’importe quoi. Moi j’ai un travail qui me nourrit, la musique c’est ce que je fais pour le plaisir car, j’estime qu’un artiste ne devient pas milliardaire, il est riche par son art »

    Pourtant il vient de décider, enfin, d’éditer ses œuvres, toutes enregistrées à la radio sur près d’un demi-siècle, au grand bonheur de ses innombrables admirateurs qui pourront enfin savourer son art à leur guise et ne plus dépendre du « diktat » de la programmation au niveau de la radio. Cela signifie aussi le début d’une nouvelle page à écrire dans la carrière singulièrement effacée mais ô combien prodigieuse de l’un des auteurs compositeurs interprètes les plus humbles du pays.

    Cela soulève tout de même la lancinante question de la qualité technique en deçà du niveau de qualité et de perfection qu’offrent les moyens d’enregistrement dont dispose l’industrie musicale contemporaine par rapport aux conditions matérielles et techniques dans lesquelles ces chefs-d’œuvre ont été fixés sur leurs supports au niveau de la radio, avec en sus, la tendance orchestrale de jadis, portée sur les grands orchestres.

    Le souci de rester authentique à ce qu’a toujours connu son public qui l’adulait jusque-là, à travers sa voix diffusée par la radio, serait probablement au centre de ce choix : Offrir enfin, telles des fleurs, en bouquets, ses œuvres telles qu’elles ont été conçues et découvertes. « Oui, mais… » répliqueront certains qui soulignent la nécessité de voir Hamid Medjahed reprendre son bâton de pèlerin et rentrer dans un studio pour donner une nouvelle vie à ses chansons en les adaptant à l’évolution de notre époque.

    Il est cependant inconcevable d’aller décortiquer ces anciens nouveaux produits de l’œuvre medjahedienne sans marquer une halte afin de signaler que cette série d’albums contiendra trois musiques et un texte inédits de Medjahed Hamid qui devaient être chantés par Matoub Lounès. Le texte est un hymne à la gloire du grand amour qui avait lié « Le Rebelle » à Djamila. En effet, quelques temps avant qu’il ne soit assassiné, Lounès sollicite Hamid Medjahed pour une collaboration, la reconnaissance et l’admiration étant d’une parfaite réciprocité entre deux titans de la chanson. Comme à l’accoutumée, il était question d’innover et de surprendre par la fusion des deux styles pour défier les limites de l’imaginaire et de la beauté et offrir à deux maîtres incontestés un temple artistique qui ne verra, hélas, jamais le jour. Ainsi auront décidé les chasseurs d’étoiles qui mettront un terme à la vie d’une légende qui accèdera depuis à l’éternité.

    Le premier album « D-Kem » [2], sorti chez Maâtkas Music au milieu de l’année 2007 vient d’être suivi par un deuxième opus « Tagujilt » [3] en ce début 2008 qui sera, à son tour, suivi par un troisième dans les prochains mois. Comme pour signifier l’éternelle jeunesse de l’œuvre, Hamid Medjahed décide d’apposer sur les jaquettes de tous les albums, la même illustration : la photo de ses vingt ans. Il conviendra de signaler que le socle musical de Hamid Medjahed s’inspire résolument de la pop-rock, en vogue durant les sixties et les seventies dans les milieux universitaires, intellectuels et de la jeunesse mais aussi de l’universel dit classique.

    Le premier opus, frappé à juste titre de la mention « Enfin Medjahed Hamid », est une véritable béatitude pour les fans mais aussi pour tous les mélomanes épris de belles mélodies sous forme de ballades, de berceuses et autres. La poésie medjahedienne quant à elle, est d’une profondeur telle que l’émotivité est aussitôt convoquée. La thématique, aussi riche que bariolée, puise dans l’intemporel.

    Des œuvres pérennes sont généreusement offertes au public à travers notamment le titre inaugural « D-Kem » [4] dans sa version originale qui, disons-le tout de suite, reste la plus célèbre des chansons de Hamid Medjahed. « D-Kem » a profondément marqué les générations qui l’ont vu naître, elle n’ensorcellera pas moins celles d’aujourd’hui qui la découvriront pour la première fois. Seule bémol côté sonorités serait peut-être l’orchestration de certains titres, dont l’enregistrement exclusivement radiophonique remonte à plusieurs décennies, quelque peu en décalage, dirions-nous, par rapport aux tendances actuelles portées essentiellement sur les rythmes autrement plus endiablés et qui pourrait constituer un semblant de ralentisseur à l’engouement des plus jeunes en proie à l’absence de toute campagne de promotion du produit.

    « D-Kem » est donc un univers infini de sensibilité et d’émotion nostalgique qui bouleverse d’aucuns quand d’autres se surprendront dans une embarcation qui conjugue merveilleusement le passé au présent pour mieux se frayer une place dans le futur. «  D-Kem » à l’instar de certaines chansons d’ailleurs a connu un remake musical et de nouveaux arrangements s’inscrivant dans l’universalité à travers une instrumentation réduite à quelques guitares sèches qui se donnent la réplique par des jeux d’arpèges aussi judicieux que gracieux, du solo et des accompagnements qui, par moment pour ne pas dire souvent, sont exécutés à la manière typiquement « kabyle ». Un patchwork des multiples voix de la guitare qui s’agrémente intelligemment tantôt des instruments pastoraux des hautes montagnes que sont la flûte et l’abendayer, tantôt du piano…

    « D-Kem » c’est enfin une chanson d’amour qui ne manquera pas de raviver des souvenirs, voire des passions que le temps a fini par faire sombrer dans les méandres de la vie et de ses tourments.

    Ensuite, vient «  Ccah degnegh » [5], une œuvre critique sur ce qui en nous rend possible toutes les injustices et les dénis que nous subissons sans cesse. Le poète, sans verser dans les remontrances stériles et insolentes, incite les siens, avec des mots de tous les jours, à tenter un regarder introspectif pour déceler les tares, la négativité, la passivité et cette tendance annihiliste qui consiste à saper systématiquement tout initiative constructive au grand bonheur des ennemis qui s’en nourrissent :

    Amek ar a kwen-id-sfehmegh / Comment vous l’expliquer
    Wellah ar âewqegh / J’en suis confus _ Macci dayen isehlen / Ce n’est guère une sinécure
    Ayen ibanen iâerqegh / L’évidence nous échappe
    Netsa zdatnegh / Quand elle se trouve devant nous
    Netsmuqul ayen ibâden / Notre regard parti au loin
    Macci akka i’grad fellagh / Ce n’était pas notre destin
    Ass-a farqen-agh / D’être ainsi divisés
    Tsadhsan degnegh iâdawen / nos ennemies en ricanent
    Ccah degnegh / Bien fait pour nous.

    La mesure glisse sensiblement vers la douceur avec « A yidh » [6] qui, tel un fleuve, charrie inexorablement dans l’un des thèmes de prédilection du poète en mettant en scène le monde sombre et émouvant de la tristesse. «  Idh » évoque le froid, la solitude, le souvenir de l’être cher disparu, la mort et l’attente :

    Yexla wemkan i deg itellidh / Ta place est vide
    Yehzen win i kem-id-yemektin / Triste est celui que ton souvenir hante
    Kem s-ddaw tmedlin terkidh / Pendant que sous terre tu te consumes
    Nek tsrugh, mektagh-ed lexyal im / A travers mes larmes, j’entrevoie ta silhouette
    Ts’runt wallen iw / Mes yeux sont en larmes
    Yahzen wul iw / Mon cœur affligé

    « Imdhebren » [7] dans sa version originale est un discours à l’encontre de « la chanson » elle-même avec qui l’auteur entretient une relation quasi charnelle qui est non sans rappeler Nedjma et Kateb ou encore «  tayri umedyaz » d’Inasliyen que Djamal Amrani résume à sa manière dans « Vers l’Amont » (Ed. ENL, Alger - 1989) :

    Une succion de bon-vouloir / autour du vide disponible / que nous sommes / Une entorse à l’inventaire / de mes vertèbres / Toi moi / cousus vivants / dans une même peau.

    Dans son propos, « Imdhebren » met le doigt sur des charlatans et autres instigateurs qui envahissent tous les espaces pour se décréter spécialistes, connaisseurs et décider de ce qui est bon et de ce qui ne l’est pas dans le monde de la chanson qui en accuse le coup en s’appauvrissant car garrotté et isolé du poète accusé d’impotence et de l’artiste calomnié. Pour autant, le maître refuse la fatalité puisque sur un ton qui se veut rassurant, celui-ci console son art en lui assenant sa vérité en guise d’espoir consistant à dire que, fort heureusement d’ailleurs, celui-ci dispose de nombreux érudits qui triompheront de la médiocrité ambiante pour lui redonner tout le prestige qui lui est du. La beauté de la mélodie fait de « Imdhebren » une œuvre qui n’a pas pris une seule ride ; sa thématique multidimensionnelle a, admirablement, résisté à l’érosion du temps qui passe.

    C’est Ben Mohammed, une autre icône de la poésie et auteur de nombreux textes qui ont fait la renommée d’une pléiade d’artistes tel que « vava inouva » interprété par Idir, qui signe, encore ici, « Helkegh ntarregh » [8] ; une chanson émotionnelle faisant l’éloge à la beauté décrite par un cœur terrassé par un coup de foudre. Le réceptacle musical se veut classique et s’inscrit dans la lignée du maestro Cherif Kheddam que Medjahed Hamid qualifie « d’école ». A ce propos, il se remémore encore avec beaucoup de fierté et non sans une petite note d’ironie lorsqu’il avait tenté la périlleuse « … expérience de tester mes capacités dans le domaine de la composition musicale et voir si je pouvais faire comme Cherif Kheddam en composant quelques unes des chansons de Nouara … ». Sa satisfaction fut entière quand il entendait, à chacune de leur diffusion, les animateurs de la radio en attribuer « paroles et musique » à l’auteur de «  Lemri » [9] !

    « Tawes » est une berceuse qui fait intervenir la voix majestueuse, débordante d’énergie et d’une authenticité singulière de Taous Amrouche, cette autre grande diva qui a su exhumer de l’oubli une mémoire collective inestimable. Un hommage grandeur nature à la mesure du talent à l’étendue multiple d’une femme qui reste un repère éternel qui guidera les pas d’un peuple en quête permanente de son identité et de sa liberté. Meziane Rachid qui écrivit le texte conclut par une maxime populaire qui se fond intimement dans le nom de l’illustre auteur de « la colline oubliée » :

    Yella walbaâdh / Untel existe
    Yella ulac-it / Mais il est anonyme
    Yella walbaâdh / Il est d’un autre
    Ulac-it Yella / Même disparu, il est présent.

    Enfin, le premier volume des œuvres de Medjahed Hamid s’achève avec une nouvelle version de «  Lmut  » (La mort) qui nous replonge dans une véritable procession de spectres jalonnant l’univers sombre de l’affliction avant l’amorce du dur processus de résilience. Le drame tragique de la mort qui, malgré sa fatalité, reste une épreuve par trop saillante dans la vie humaine pour s’en détourner.

    Cet univers lugubre et éploré semble coller au recueil si bien que la mue vers le deuxième volume s’effectue dans un mouvement diligent qui coulisse sur le même registre à travers « Tagujilt » [10], écrite par Aït-Amirat Nordine, qui s’entame par un prélude en istikhbar à la manière Medjahed qui ne ressemble à nulle autre. La voix veloutée et chaleureuse décrit le vécu difficile d’une orpheline abandonnée par sa fratrie et craignant les préjugés et l’anathème. Lui prêtant sa voix, la pupille interpelle son « sang » sur sa situation qu’exacerbe l’indifférence.

    Continuant de voguer sur les chemins escarpés de l’impétuosité de la vie, « A yizri-w » (Mes larmes) sécrète des émanations mélancoliques qui, du reste, faisant partie intégrante de la thématique de l’œuvre mais qui atteint ici, dans « Tagujilt » et «  A yizri-w » ses points culminants. La gracieuse mélodie est composée par l’un des pionniers de la chanson kabyle, Chikh Nordine en l’occurrence. Les arrangements exquis libèrent une volupté captivante par la finesse et la pureté de l’omniprésence de la guitare, instrument nodal dans l’œuvre medjahedienne :

    A yizri-w azzel am tala / Ô larmes, coulez telle l’eau de la fontaine
    A tadhsa ur yi-d-tsali / Ô rires, ne jaillissez point de mes entrailles
    Di ssura-w tezdegh tawla / La fièvre a installé ses quartiers dans mon corps
    Mi nâardh a nbedd a neghli / Vacillant à chaque mouvement

    Ecrit par Meziane Rachid et mis en musique par Hamid Medjahed dans une instrumentation s’inscrivant en droite ligne des précédents airs avec une plus ample ambiance en raison d’un jeu d’accompagnement plus évident, « Lebghi » (Le bon vouloir) est, de ce point de vue, assez suggestive et pleine de réminiscence au point où l’ont est dans l’incapacité de ne pas sentir la remise à flot de « Aqcic d uâettar » (le garçon et le mendiant) du groupe Imazighen Imulla. La rupture est aussitôt prononcée en rompant avec le césarisme de la guitare sèche qui, dans « Abehri » (La brise) cède le champ à l’orchestre classique qui avait accompagné la quasi majorité des chanteurs ayant enregistré leurs œuvres au niveau de la radio. Une sorte de musique savante portant l’empreinte des orchestres orientaux de l’époque sur fond de folklore kabyle. La poésie quant à elle, charge le vent frais, léger et régulier de transmettre le message où il est question de supplice du à l’exil de celui qui est resté inconsolable en raison de l’éloignement et de l’absence de sa dulcinée.

    Le glissement vers « Hader iman im » (Gare à toi) s’effectue progressivement pour puiser dans le registre des admonestations et des complaintes que sont autant de litanies que porte le patriarcat de l’homme sur le compte de l’épouse dans un langage qui révèle la complexité de la relation au sein du couple irrigué de traditions et d’us. L’épouse ainsi mise dans une situation paradoxale, est sommée de trancher devant un dilemme périlleux, unique cas où le libre choix, systématiquement dénié, lui est accordé.

    Enfin, le second volume s’achève sur une note moins personnelle où l’on note cet engagement foncier et humble dans sa ténacité propre au répertoire medjahedien. L’identité, une justice égalitaire mais aussi, qualité d’artiste oblige, le renouveau de la chanson qui devra tendre en permanence vers l’idéal, sont entre autres credo qui transparaissent dans « Afus deg-gfus » (Union) qui est une sorte d’hymne dont la mélodie, encore une fois, porte la touche de Chikh Nordine, et élaborée sur une cadence se situant entre la berceuse et la ballade. Le barde exhorte son peuple à se rassembler en se dessaisissant des réflexes inhibiteurs qui l’ont confiné jusque là dans un statut d’assujetti et à faire face aux aléas de la vie qui bouleversent son quotidien et malmènent ses espérances. Le burnous, eu égard à sa symbolique dans la culture populaire, est mis à contribution dans une métaphore aussi circonspecte qu’expressive :

    Lharma nnegh d abernus / Le burnous est notre dignité
    Afus deg-gfus                      / Unissons-nous
    Sakwit amdan ma yettes / Éveillez l’inconscient
    S-tegmats ad as-nalles    / Le renouveau émanera de la fraternité

    Deux albums qui se savourent d’un seul trait et qui sont autant de promesses de nouvelles allégresses que les prochains volumes des « anciennes nouvelles » œuvres de Hamid Medjahed ne manqueront assurément pas de gratifier l’arène musicale nationale et, touche du maître oblige, d’en susciter des vocations.

    Halim AKLI

     

     

     

    Hamid Medjahed : La renaissance de l’humble maître
    « le: 15 Septembre 2008 à 16:32:19 »
     






    Aït Menguellet et Matoub et le monde carcéral

    23/10/2008 19:40

    Aït Menguellet et Matoub et le monde carcéral


    Deux prisonniers, un destin
    Aït Menguellet et Matoub et le monde carcéral

    La littérature kabyle orale a pu immortaliser ces moments d’angoisse, de questionnement  et de lutte pour la survie dans des strophes exceptionnellement émouvantes où l’épopée et le lyrisme se trouvent naturellement enchevêtrés. Si Muh U M’hand, la poésie populaire du Mouvement national et de la guerre de Libération, Ferhat Imazighène Imula, Mohya, Aït Menguellet, Matoub Lounès et d’autres poètes dont les pièces ont eu une moindre fortune, la plupart  des hommes du verbe kabyle ont eu, à un moment ou un autre de leur carrière artistique, abordé, traité et disséqué la situation du prisonnier.

    Par Amar Naït Messaoud

     

     

    "C’est dans les bas-fonds Qu’on pousse les hauts cris"  Jacques Prévert (dans ‘’Fatras’’)

     

    L’histoire de la société kabyle est faite de grande adversité et de lutte permanente pour les libertés. Ayant été cantonnée dans un espace géographique montagneux, elle développa un esprit de résistance sans faille à toute forme d’invasion et de domination.

    Le choix même des ces rudes espaces pour y vivre, produire et commercer est un signe d’une volonté irréfragable, d’une volonté de vivre en liberté et de n’accepter aucune soumission. Dans l’histoire de l’Algérie sous domination ottomane- qui offre un minimum de ‘’lisibilité’’ par rapport aux  périodes antérieures-, l’établissement d’une principauté sous le nom du ‘’royaume de Koukou’’ qui s’étendait sur les deux Kabylies (grande et petite) est un moment fort de cette tendance à s’autogouverner loin des jougs extérieurs et des dépendances castratrices.

    Tout en s’insérant dans le grand ensemble national-aucune situation engageant le destin de la nation ne lui a échappé-, la Kabylie a développé en son sein une organisation sociale, une culture politique et une philosophie de la vie dont la profondeur et la portée sont jusqu’à ce jour objets d’études et d’analyses anthropologiques et sociologiques.

    Ce destin quelque peu particulier ne pouvait pas s’accomplir dans la sérénité ou sans accros. À chaque fois que l’Algérie est ciblée dans sa stabilité ou sa souveraineté, la Kabylie s’offre en sacrifice.

    Ce n’est, après tout, qu’une logique de l’histoire pour une région qui symbolise l’authenticité et la permanence d’une identité millénaire. Le climat d’hostilité et de bellicisme imposé par l’histoire à la Kabylie s’accompagne à chaque fois de son lot de morts, de blessés, de déportés et de prisonniers.

    Dans l’histoire moderne du pays, l’on peut avoir des témoignages assez précis sur les déportés à Cayenne (en Guyane française), en Nouvelle Calédonie, au Sahara, à Paul Gazelles (Aïn Oussara),…comme nous parviennent les cris et pensées des prisonniers de guerre pris dans les tranchées des frontières franco-allemandes entre 1914 et 1918, des détenu(e)s de la Santé et de Fresnes en métropole française, des incarcéré(e)s de Barberousse, El Harrach, Lambèse et Berrouaghia.

    Toutes les époques ont connu leurs cortèges de prisonniers et la littérature que cette situation a charriée avec elle.  Ces noms nous sont devenus familiers car nos aïeux et nos concitoyens y ont séjourné ou y ont rendu l’âme. La lutte qui consiste à faire valoir ses droits en matière de souveraineté, de liberté et d’identité est inexorablement suivie de son lot de peines, de larmes et de captivité.

    La littérature kabyle orale a pu immortaliser ces moments d’angoisse, de questionnement  et de lutte pour la survie dans des strophes exceptionnellement émouvantes où l’épopée et le lyrisme se trouvent naturellement enchevêtrés.

    Si Muh U M’hand, la poésie populaire du Mouvement national et de la guerre de Libération, Ferhat Imazighène Imula, Mohya, Aït Menguellet, Matoub Lounès et d’autres poètes dont les pièces ont eu une moindre fortune, la plupart  des hommes du verbe kabyle ont eu, à un moment ou un autre de leur carrière artistique, abordé, traité et disséqué la situation du prisonnier. Étant un fait de société dont le contexte et la réalisation sont bien connus du fait d’une histoire tourmentée, la vie carcérale est étudiée dans son contenu intime et au niveau des mobiles qui lui ont donné naissance. 

    Dans les deux chansons dont nous présentons la traduction, Aït Menguelet (1979) et Matoub Lounès (1981) mettent toute leur verve poétique au service d’une approche réelle du monde du prisonnier. Dans ‘’Amcum’’, il retrace le destin d’un militant qui s’est sacrifié pour une noble cause engageant le destin collectif de ses compatriotes. L’esprit de la lutte, l’âme de la résistance et le devoir de ne pas fléchir devant l’arbitraire et la tyrannie le conduisent tout droit au cachot. Lui seul subira les affres de la prison. Non pas qu’il menât seul le combat, mais il fut abandonné en cours de route par ses camarades avec qui il mangea du pain sec.

    Par peur, par lâcheté, suite à des pressions ou à des promesses alléchantes, tous les cas de figure peuvent se présenter et conduire à disperser les rangs, à semer la zizanie, le doute et la perplexité parmi les membres du groupe. Le héros du poème se retrouvera seul face à la machine infernale de la répression. Que sont les amitiés militantes devenues ? Que représente le serment de solidarité et de destin commun que les militants ont fait ?

    Matoub, quant à lui, utilisera tout son pouvoir d’imagination pour décrire la situation d’un prisonnier qui attend son procès et dont il entrevoit l’issue fatale, la perpétuité. Sa mère, qui interroge le vent sur le sort de son fils, l’encourage à subir seul son destin au lieu de dénoncer ses camarades de lutte restés en liberté. Le poème grouille d’émouvantes métaphores pour décrire l’attente puis la résignation de la mère.

    Nos deux prisonniers ont cette particularité commune de subir les affres de la répression dans une Algérie indépendante. Ils ont aussi cette grande qualité, cette rare bravoure de ne pas ‘’fléchir devant l’humiliation’’ (Ugin ad knun zdat ddel), une phrase qu’on retrouve textuellement dans les deux poèmes. La vaillance se trouve du côté de ceux qu’on a voulu humilier et avilir par une privation de la liberté. D’après Bernard Schaw, "l’homme le plus inquiet d’une prison est le directeur’’.

    Dans un rêve que fait un prisonnier, Matoub le fait voyager chez lui pour revoir ses parents, sa femme et ses enfants. C’est dans un poème faisant partie de l’album “A Tarwa l’hif’’ (1986) :

     

    " Si je pouvais me détacher,

    Je viendrais vous voir le jour de l’Aïd.

    Je vous saluerais alors chers parents.

    Quand je me présenterai au village,

    Je ne serai pas surpris par votre perplexité.

    Ce n’est pas mon visage d’antan

    Qu’auront à rencontrer vos yeux.

    Parce qu’il ne me reconnaîtra plus,

    Mon fils me fuira.

    Ma femme légitime, je ne sais

    S’il elle se souviendra de moi.

    J’aurai alors dérangé la quiétude de tout le monde

    Jusqu’à leur faire perdre la parole.

    À la fin nous nous reconnaîtrons ;

    Le village hâtera le pas à ma rencontre.

    Ce n’est là qu’une espérance ;

    Mon rêve n’a pas duré longtemps.

    La porte de la prison est bien close.

    Sur elle mon étiquette se pose,

    Bien collée et sigillée,

    Me désignant à perpétuité ".

     

    Dans ‘’Asefru’’, Aït Menguellet nous transmet les sentiments blasés et les sensations de désenchantement d’un prisonnier qui a perdu le goût des belles choses suite à une incarcération castratrice de réflexion et du sens de l’esthétique :

     

    "La rose à la belle figure,

    j’envie ceux qui l’admirent encore.

    Naguère, comme eux, j’en connaissais le parfum ;

    Ores, je ne veux plus la regarder.

    Quand je vois une main ceinte d’une gourmette,

    Ce sont les chaînes qui me viennent à la tête. 

    N’en cherchez pas la raison ;

    Dites seulement que je suis à plaindre ".

     

    Amar Naït Messaoud

     

    Textes

     Aït Menguellet : “Amcum’’

     1-Il vous appellera ;

    Lui répondrez-vous ?

    Si vous faites sourde oreille,

    Rien d’étonnant à cela.

    Ne disait-on pas

    Que c’est dans l’adversité

    Que l’on reconnaît son ami ?

    S’il est prévenant,

    Il bravera toute difficulté.

     

    2-Il vous appellera ;

    Vous l’entendrez, il le sait.

    C’est clair que vous l’entendrez ;

    Mais, rendrez-vous-lui écho ?

    L’homme, cupide qu’il est,

    Est devenu tel un aigle :

    Voyant un bâton,

    Il le prit pour un serpent.

     

     

    3-Voilà que je le trouve égaré,

    Piégé derrière les barreaux.

    C’est son sens de la dignité qui l’y a mené,

    Refusant de fléchir devant l’humiliation.

    Le jour où vous entendîtes ses cris,

    ô vous, ses amis,

    Chacun vaquait à ses propres affaires.

     

    4- Il avait affronté l’impossible,

    Se croyant par vous soutenu.

    Comptant vous avoir derrière lui,

    Il vous appellerait au besoin.

    Le jour où vous entendîtes ses cris,

    ô vous, ses amis,

    Chacun, fuyant, prit son chemin.

     

    5- Il était allé affronter le feu

    Pour sauver ce qui restait encore.

    Vous l’aviez aidé par des mots creux,

    Alors qu’il défendait votre bien.

    Le jour où vous entendîtes ses cris,

    ô vous, ses amis,

    Chacun avançait un empêchement.

     

    6- Vous l’avez envoyé à l’avant-poste, il y est allé

    Sans avoir personne à ses côtés.

    Vous dites l’aimer comme vous-mêmes,

    Mais trop risquée est la voie qu’il a choisie.

    Le jour où vous entendîtes ses cris,

    ô vous, ses amis,

    Vous fûtes enchaînés par la peur.

     

    7- Vous rafistolez les lacérations, enfin,

    C’était à bon droit.

    Si vous l’aviez alors rejoint,

    Qui aurait bénéficié des fruits de la lutte à la fin ?

    Et le jour où vous entendîtes ses cris,

    ô vous, ses amis,

    Vous dîtes de lui qu’il n’était pas rusé.

     

    8- Quand il regrettait, il était bien tard ;

    Il comprit qu’il n’étai pas rusé,

    Bien qu’il éveillât plus d’un.

    Sur ce dont vous traitez à présent.

    Et si vous entendiez ses cris,

    ô vous ses amis,

    Sans doute vous en perdriez le sommeil !

     

    Matoub : ‘’Bagnard à Berrouaghia’’

     

    1-Son âme agonise

    Tel un grain dans une meule.

    Il attend son tour et pleure

    Mon bagnard !

     

    2-Il craint que vous voyiez en lui un téméraire,

    à la fin, vous risquez de l’oublier.

    Vers lui, qui ouvrira la voie ?

    Mon bagnard !

     

    3-L’arbitraire montre ses repousses.

    Vers l’avant se dresse un précipice,

    La mort approche par derrière.

    Mon bagnard !

     

    4-Appelle-le donc, ô mon cœur, appelle-le !

    Dis-lui, s’il écoute,

    De se garder de dénoncer qui que ce soit.

    Mon bagnard !

     

    5- ô vent qui berce les oliviers

    Apprends-moi, je t’implore, les nouvelles.

    Je ressemble à du bois vermoulu

    Que les gens refusent même à brûler dans les foyers.

    Quelle raison l’a exilé

    Et l’a ravi brutalement aux siens ?

    ô vent qui me rend visite,

    T’a-t-il chargé d’un message, mon bagnard ?

     

    6-A trop écouter les gens,

    Mes mains se refusent à l’ouvrage.

    Le chagrin attise mes malheurs

    Et remplit mes jours de noirceur.

    J’ai surpris des gens converser,

    À ma vue ils ont baissé les yeux.

    Vent, c’est à toi de m’apprendre

    S’il est encore en vie mon bagnard.

     

    7-Le cœur halète à l’arrivée du vent de mars.

    Dès que je porte la coupe aux lèvres,

    On vient me l’en saisir.

    Aujourd’hui, je sais, je l’ai perdu ;

    Mes yeux ne le reverront plus.

    Vent, viens me dire

    Où la vague a largué mon bagnard.

     

    8-La paix que j’attendais a failli

    Au rendez-vous pourtant accordé.

    La belle tragédie s’est fardée

    Et vient m’offrir des cadeaux chez moi.

    Maintenant je comprends la raison de son retard,

    Et pourquoi son retour est une chimère :

    Il refuse de fléchir devant l’humiliation

    Dans le pénitencier de Berrouaghia,

    Mon bagnard !

     

    Traduction : Amar Naït Messaoud

     

     

     

     
       





    A Yagu ou la Révolution qui dévore ses enfants

    23/10/2008 19:39

    A Yagu ou la Révolution qui dévore ses enfants


    Lecture de A Yagu d’Aït Menguellet
     
    La Dépêche de Kabylie 17/10/2007
    Les aspirations à l’émancipation et au recouvrement des libertés sont énoncés dans A yitij hader atteghlidh et Da nnubak freh.

    La chanson d’Aït Mengulelet A Yagu a été éditée en 1979. Elle fait partie d’un album-éponyme qui a succédé à deux autres albums d’un destin exceptionnel : Si lxedma n luzin s axxam ( 1976 ) et Amjahed (1977). Le contexte politique de l’époque, fait de répression des libertés et de règne de la pensée unique, a fait que certaines chansons de notre poète ( à l’exemple de Amjahed ), sans qu’elles aient subi la censure en Algérie, aient été d’abord popularisées par des émission de…Radio Tanger à une année avant l’explosion d’avril 1980, Lounis nous donne les éléments de lecture de ce qui va devenir le destin particulier d’une région, d’une culture.

     

    L’album A Yagu comprend cinq chansons lesquelles constituent un concentré de sensibilité poétique et esthétique de grande facture, une analyse historique et politique de la situation du pays et, enfin, une ébauche de perspective où les aspirations à la liberté et à la citoyenneté sont clairement exprimées.

    Nous sommes en 1978. Le Président Boumediène meurt à la fin du mois de décembre. La guerre de succession a valu à la Kabylie la mise en scène de l’avion militaire, Hercule C 130, qui ‘’a déposé des armes’’ à Cap Sigli, dans la wilaya de Béjaïa. L’héritage de la période Boumediène a été très lourd non seulement en matière de déni des droits et de despotisme, mais également par les jeux malsains et dangereux auxquels se sont livrées les autorités sur le plan maghrébin. L’affaire du Sahara Occidental a éclaté en 1975, moins d’une année après le départ des Espagnols de ce territoire peu connu. Il n’y a pas lieu de discuter ici de la légitimité de la lutte des Sahraouis pour rendre effective l’indépendance de leur pays, indépendance non admise par les Marocains. Néanmoins, le degré d’implication de l’Algérie dans ce conflit a fait que des contingents entiers de soldats algériens y furent envoyés. Certains y perdront la vie, d’autres seront faits prisonniers. Même si l’affaire d’Amgala ne fait pas partie de l’historiographie officielle du pays, elle n’en marquera pas moins l’esprit et la mémoire des Algériens.

    Dans l’album A Yagu, nous retrouvons l’atmosphère de la guerre des sables à travers la chanson Ardjuyi. À part les indications spatiales précises, ce conflit n’est pas situé temporellement. Mais, il est bien dit que «ceux qui gouvernent m’ont crée des ennemis» et aussi : «Ils m’ont appris que la guerre est prioritaire». Sous forme épistolaire (le soldat du contingent s’exprime dans une lettre à sa femme), Ardjuyi est un chef-d’œuvre en la matière. Outre la dénonciation d’une guerre qui ‘’ne nous regarde pas’’, le poème, conduit à la manière d’une épopée, est un véritable hymne à la paix où le lyrisme a aussi sa place. La fille du soldat, qui naîtra en son absence, sera dénommé Lahna (Paix) sur recommandation de son père posté sur le front et dont le seul souci et que la paix se rétablisse.

    La chanson Amcum est un réquisitoire contre la trahison et l’effilochement des amitiés militantes. Le héros est un élément d’un groupe de militants pour la liberté que son destin offrira en hostie, alors que ses anciens amis s’en désolidarisent.

    Les aspirations à l’émancipation et au recouvrement des libertés sont énoncés dans A yitij hader atteghlidh et Da nnubak freh.

    Quant au titre A Yagu, il renvoie à un exilé dont la patrie subit le règne de l’arbitraire. Dans un prélude où la poésie se mêle à la méditation, il s’adresse à ses anciens amis. Il les hèle vainement. Il les retrouve dans le rêve. Il les considère comme la seule voie de secours pour chasser l’angoisse qui le hante et qui le dévore sur une terre étrangère.

    Dans un rappel historique, le poète met en scène un pays innommé, mais il s’agit bien sûr de l’Algérie, où toutes les cartes sont brouillées. Ceux qui, hier, furent du côté de l’ennemi sont aux commandes. Ils ont chassé tous les autres, ceux-là même qui ‘’ont préparé la grenaille de plomb» pour l’ennemi au moment où les autres lui préparaient des ‘’agapes’’.

    Mais, la génération d’alors, happée par les nécessités terre à terre d’aujourd’hui, ne se souvient plus. La mémoire de la nouvelle génération ne s’articule sur aucun relais. Il faut bien procéder à un travail de mémoire. Le héros du poème rappelle que, à la fin de cette ‘’malédiction’’ (la guerre), il finit par tomber sous la férule et la protection des anciens félons.

    Gardant sa fierté et ne voulant céder à aucun clientélisme, il fait valoir l’authenticité de ses racines :  ‘’ C’est du bois de chêne que je suis fait et non de l’engeance du roseau ’’. C’est alors qu’il décide de s’exiler laissant son frère aux commandes ‘’ se livrer à ses lubies ’’ (‘’ labourer et battre le blé ’’, selon le texte kabyle).

    Ce sont tous les avatars de l’Algérie indépendante qui sont sériés dans ce texte d’Aït Menguellet. C’est la révolution dévoreuse de ses enfants. Exilés politiques, artistes réduits au silence, exilés de la parole libre, bref, tous ceux qui ont subi le retour de manivelle d’un combat dénaturé et perverti par les ‘’légionnaires’’ de la 25e heure et les médiocres à qui le destin a curieusement et injustement souri. Une vacuité sidérale hante le pays et un malaise indéfinissable habite les esprits.

    Le poète y met une poésie d’une rare beauté faisant intervenir un élément du cosmos, la lune, que l’exilé interrogera par une série de questions. Ici, la lune est considéré comme un élément fédérateur observé par l’exilé depuis son lieu d’élection mais aussi par les amis qu’il a laissés au pays. Subitement, un autre élément de la nature survient. C’est le brouillard. L’exilé engagera un dialogue avec cette masse brumeuse. Il la questionnera sur son lieu de provenance. Le brouillard vient du pays du proscrit. Qu’a-t-il vu ?

    Il a vu les amis chéris de notre infortuné proscrit. Ce dernier veut savoir si son frère tien toujours les rênes du pouvoir. Le brouillard lui répond par l’affirmative en lui faisant observer que c’est un ‘’pouvoir sans brides’’ qui ne redouterait rien ni personne à vouloir se perpétuer. L’arbitraire continue, lui apprend-t il. Même si, par intermittences, il est mis en veilleuse, il se régénère.

    Voulant savoir où se destine exactement le brouillard que ramènent les vents jusqu’au lieu où se trouve le proscrit, cet élément de la nature lui annonce qu’il vient en mission, sur ordre des frères régnant sur le pays, pour voiler le soleil de l’infortune exilé !

    Mordante allégorie à la situation d’arbitraire vécue par l’Algérie pendant les années 70 après une révolution sanglante mais prometteuse, A Yagu est l’un des textes d’Aït Menguellet les plus élaborés sur le plan du style, du contenu politique et revendicatif et sur le plan de la ‘’narration’’ si l’on peut se permettre ce concept appliqué à la prose.

    ( Publié dans ‘’ Passerelles ’’ de juillet 2007 )
     

    La chanson d’Aït Mengulelet A Yagu a été éditée en 1979. Elle fait partie d’un album-éponyme qui a succédé à deux autres albums d’un destin exceptionnel : Si lxedma n luzin s axxam ( 1976 ) et Amjahed (1977). Le contexte politique de l’époque, fait de répression des libertés et de règne de la pensée unique, a fait que certaines chansons de notre poète ( à l’exemple de Amjahed ), sans qu’elles aient subi la censure en Algérie, aient été d’abord popularisées par des émission de…Radio Tanger à une année avant l’explosion d’avril 1980, Lounis nous donne les éléments de lecture de ce qui va devenir le destin particulier d’une région, d’une culture.
    par Amar Naït Messaoud.






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