A ceux que le vent a emportés Le vent de panique qui a soufflé Porte-leur mon message Dis-leur ceci :
Que la malédiction est partie Qu’ils peuvent maintenant revenir Au pays nous avons trouvé un guide Parmi les hommes rares qui nous sont restés Son père est Kabyle des montagnes Sa mère est Arabe des Chleuh C’est un vrai dirigeant Nous n’admettrons de le perdre A sa venue les brumes se dissipèrent Au pays, il saura insuffler une âme
Dis-leur, la malédiction est finie De nos querelles, plus de traces Dis-leur que nous les attendons Le pays a besoin de ses enfants
Dis-leur de revenir Chacun sa place l’attend Chez-eux, avec les leurs, ils s’uniront Et se réjouiront avec leurs enfants
Dis-leur, la porte est ouverte Abattues les palissades Toutes les voies sont libres D’étrangers, le pays regorge toutes les saisons C’est par milliers qu’ils affluent
Dis-leur de revenir De l’arbitraire, plus de trace Le despotisme qu’ils ont connu jadis L’on n’évoque même pas son nom Les tyrans d’hier Et tous les geôliers Dans le droit chemin, ils sont revenus Et ont compris leurs vraies missions L’armée est dans les casernes Les fusils ne sont plus que rouilles Ni tueurs, ni tués Les tordus sont redressés Nous sommes sortis des ténèbres Nos infortunes sont effacées Ceux qui ont pris le maquis Grâce à Dieu, ils ont revenus au droit-chemin Guidés par les bienfaiteurs Il n’y a plus de chômeurs Le peuple entier travaille Nul n’est plus dans la détresse Sur chaque visage, la paix est répandue Le bon grain domine l’ivraie Les récoltes débordent Le paysan se remet à travailler sa terre A vendre et à récolter Et même les journaux Ont appris à dire la vérité
Dis-leur, la paix est enfin là Au printemps, elle a donné rendez-vous Tous les vœux sont exaucés Tout ce dont nous avons longtemps rêvé
Dis-leur de revenir S’ils pouvaient voir les villes La beauté qui les accueillera Dans chaque rue empruntée Ils ne verront et humeront Que la rose et le jasmin Des filles et des garçons Main dans la main Vont ensemble à l’école Le kabyle est enseigné Au même titre que l’arabe et le français Chacun l’aime et l’apprend N’avons-nous par les mêmes ascendants?
Dis-leur que ce n’est pas tout Il y a tant de choses encore S’ils pouvaient voir les mosquées De bons musulmans, emplis Fraternels et tolérants Acceptant l’Eglise chrétienne Les Juifs ont repris leurs commerces Avec eux, nous sommes frères A Constantine, son pays Enrico est marchand de luths
Dis-leur qu’à leur arrivée à la capitale, Avec fleurs et sourires Ce sont les gouvernants Qui les accueilleront Ils verront que tout a changé Un peuple serein et gai Ils trouveront bénédiction et sagesse Combien de lui, ils seront contents Les cœurs blessés guériront Neufs, ils en deviendront Oubliées les affres de l’exil Des malheurs, ils seront lavés Ils commenceront une nouvelle vie sur leur terre, elle s’épanouira
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Revenez, si vous ne me croyez Vous verrez de vos propres yeux Les fous tels que nous Ont droit de délirer Ce que j’ai dit n’est qu’utopie Utopie de ceux qui rêvent toujours Nous avons tous ici nos rêves
Ramenez-nous vos rêves, à vous Apportez-nous vos rêves Dans l’aire des rêves, nous les rajouterons Il y a ceux qui les battront Du mélange naîtra le discernement Le battage une fois achevé Le bon grain sortira de l’ivraie Je suis mauvais
Je suis donc si mauvais ! Vous, vous êtes si bons Vous, les destructeurs Vous mes semblables Nous sommes donc si mauvais Bons, sont ceux qui cassent les adages Et si je ne veux pas dire Descends, mon Dieu que je monte Mieux que toi, je sais Je suis mauvais
Sommes-nous dans un conte de fée ? Pourtant l’arbitraire se fait battre Sur les nobles, le silence est tombé Laissant les dépravés, sasser Si je ne chante pas les morts Si je ne me nourris pas de cadavres Je suis mauvais
De patience nous nous sommes armés A notre réveil, tous a changé Les ignorants, s’enorgueillissent Les sages adoptent le profil bas Si je suis des pudiques Si je pèse mes serments Du mauvais regard, je suis visé Je suis mauvais
J’ai trouvé l’aigle blessé Le corbeau prenait les commandes J’ai vu pleurer l’abeille La guêpe l’a délogée Si je refuse de quitter ma maison Si je refuse de m’exiler Et si à ma terre je m’agrippe Je suis mauvais
Eux préfèrent les tyrans toi, tu résistes Chaque fois que tu vas de l’avant Ils te relèguent en arrière Si je compatis avec les malheureux Si j’aime ceux les gens honnêtes Je suis mauvais
De l’injustice, ils ont pris racine Si elle n’existe, ils la créent Derrière nos malheurs, nous nous sommes murés De ceux qui agressent et se plaignent Si je suis contre l’injustice et la corruption Si de l’envie je suis l’ennemi Et si je ne dérange la quiétude des autres Je suis mauvais
A ceux qui adorent les tombes Vous y cherchez votre salut vous portez tout cet intérêt à la mort Et la vie, vous l’ensevelissez Si je dédaigne la mort qu’ils me souhaitent Si je refuse qu’ils me tuent Pour qu’ils puissent faire de moi un bœuf de battage Je suis mauvais
Si tu portes la malédiction Alors pour eux, tu es un homme Si tu fais le lit de l’intrigue Alors ils t'élèveront sur l’échelle de la gloire Si je ne fais flèche de tout bois Si je refuse d’être un alêne Et si de la louve, je ne tiens pas Je suis mauvais
Dieu, viens-nous en aide Pour les mauvais jours qui s’annoncent Sera-t-elle un jour sauvée ? De ceux qui frappent et n’intercèdent point Si je suis du côté du juste Si j’enrobe mes mots de vérité Et si je veux que le jour se lève pour nous Je suis mauvais
Lounis Aït Menguellet
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